Les humains du train

Le quai est plein. Il observe, comme chaque jour, les humains. Ils le piétinent. S’entassent sur la moitié proche des rails.

Les humains guettent le train en approche. Le quai connaît leur va-et-vient. Ça l’amuse. À chaque fois, le même numéro de cirque. Il parie souvent avec le quai d’en face sur une couleur de veste ou de valise.

Est-ce que la porte s’arrêtera devant l’humain qui lui a craché son chewing-gum ? Est-ce que ces êtres devront jouer des coudes pour être en pole position, sûrs d’être parmi les premiers à entrer pour s’asseoir ?

Lequel ignorera la dame âgée ? Fera semblant de ne pas voir cet homme en béquilles ? Regardera entre ses pieds, préférant fixer le quai plutôt que cette femme enceinte et son jeune enfant ? Ils voudront sûrement la place prioritaire. Avec quelles subtilités vont-ils les bloquer ?

Le train freine. Un silence. Le quai retient son souffle.

Un passager ose descendre. Vont-ils s’écarter et le laisser sortir ? Trop risqué. De l’autre côté, les rivaux s’engouffrent.

Quand il est enfin vide, le quai respire. Il le sait, il n’a que quelques minutes pour apercevoir le soleil ou les nuages. Quelques minutes de légèreté. Puis ils arrivent à nouveau. Au compte-gouttes. De plus en plus nombreux. De plus en plus vite. Le numéro recommence. Encore et encore.

Heureusement, vient la nuit. Le flot ralentit.
Et s’arrête quelques heures.
Pendant qu’ils dorment, les quais aussi.
Le ballet des petits animaux les chatouille de leurs pas rapprochés. Ils les nettoient des saletés que les humains ont laissées. Celles qui ne sont pas plastifiées.

L’aube arrive.
En cette journée, les quais vont s’ennuyer.
Comme seul spectacle : quelques humains pour râler.

Une grève est annoncée.

"J’ai écrit cette nouvelle le 26 février 2025, inspirée par mes trajets quotidiens en vélo + train pour aller travailler. Faire entrer un vélo dans un train, c’est une épreuve. Les gens s’installent sur la plateforme d’entrée et ne bougent pas, rendant chaque montée et descente laborieuse. Il faut presque leur rouler dessus pour passer.

Cette scène m’a rappelé mes années passées à prendre le métro, le RER et les trains de la région parisienne, où l’espace est une lutte silencieuse, les regards s’évitent et l’individualisme l’emporte souvent sur la fluidité du mouvement.

Comme j’aime adopter un point de vue extérieur, je me suis demandé : qui est le spectateur de ces ballets quotidiens ? Le quai, immobile et silencieux, voit tout. Il observe. Il parie. Il retient son souffle. De cette réflexion est née cette nouvelle."

Cateline Sola, le 26 février 2025

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Il y a des jours où une simple réunion interminable me donne envie d’inventer des maladies absurdes. D’autres fois, un match de rugby aperçu à travers la vitrine d’un pub m’inspire des images de batailles urbaines. Parfois encore, une boîte vide de gâteaux basques me pousse à imaginer des larcins nocturnes mystérieux.

C’est comme ça que ces textes sont nés. D’un rien. D’un tout petit éclat du quotidien.

Chaque moment, aussi banal soit-il, cache en lui une histoire. Il suffit parfois d’un regard différent, d’une pensée furtive ou d’une émotion trop forte pour qu’un univers prenne forme. J’ai voulu capter ces instants, les figer sur le papier, tout en floutant la frontière entre la réalité et la fiction.

Ce recueil est un journal déguisé.
Chaque texte est né d’une situation réelle, d’un moment vécu ou observé, que j’ai étiré, déformé ou parfois sublimé. Mais derrière chaque histoire, il y a une graine bien réelle — que je dévoile juste après chaque texte.

C’est un jeu de miroirs. Entre ce que je vis et ce que j’imagine. Entre l’instant et l’histoire qu’il pourrait devenir.

Et puis, il y a vous. Peut-être reconnaîtrez-vous des fragments de vos propres journées dans ces chroniques. Des petits riens qui, au fond, ne le sont pas tant que ça.

Bienvenue dans ces Chroniques de presque rien — ces Chroniques du quotidien — où l’ordinaire devient un prétexte à l’imaginaire.
 

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